Dynamiques et concurrence des normes : prospective
Mise en commun des réflexions des participants et intervenants
Pour clôturer la session 2012 de l’université d’été de l’IHEST, les participants se sont réunis en deux groupes, afin d’échanger et de dresser un bilan de la semaine écoulée.
Le premier groupe de participants est parti du double constat de prolifération et d’enracinement (entendu au sens de contextualisation) des normes, pour ensuite s’interroger sur l’effet des normes. Il y a selon eux l’effet top down qui correspond à des choix en vue de tendre vers un futur meilleur. Cela correspond à une approche centralisée, telle une galère sur laquelle seule une personne donne le rythme. Il y a aussi l’effet bottom up selon lequel il y a entre les normes un phénomène de régulation. C’est la métaphore des rameurs d’aviron qui ne se synchronisent pas forcément au départ mais aboutissent à une autorégulation. Le groupe a mis en exergue un dynamisme, tant au niveau des normes entre elles que de leur élaboration.
Egalement, la question de l’universalité est abordée, notamment faut-il viser une universalité ? Si oui, laquelle, et comment l’envisager ? La réponse à la première question est rapidement évacuée car positive. La réflexion s’est surtout attardée sur les manières d’envisager l’universalité. Première forme, elle pourrait correspondre à un noyau dur de normes, de valeurs, connaissant des déclinaisons locales. L’exemple du droit des femmes illustre cette modalité. L’universalité pourrait aussi bien aller du fait d’imposer des normes, qu’au fait de reconnaître qu’il existe des règles partagées, différentes, qu’il faut faire fonctionner ensemble. L’éventail des possibles universalités semble se décliner de la valeur unique à ses différentes articulations.
En outre, le groupe s’est interrogé sur la meilleure voie pour aborder et discuter ensemble de l’universalité. Si la science dure a été mise en avant comme un moyen évident, certains participants ont avancé que la philosophie, le marché, peuvent aussi être considérés comme tendant vers une approche universelle.
Au niveau plus opérationnel, c’est-à-dire moins abstrait que les précédentes questions, il est ressorti qu’il convient de distinguer appropriation et élaboration des normes. Une solution résiderait peut être dans l’élargissement de l’espace public, dans l’appropriation des normes via la formation. La question suivante se pose alors : comment nourrir les normes, comment les élaborer ? La méthode proposée consisterait en l’organisation de discussions par petits groupes selon les cultures, au niveau national par exemple, puis de confronter la vision ainsi obtenue à celle d’autres groupes sur le même sujet.
Le second groupe à exposer la synthèse de ses échanges sur les normes, est arrivé à la distinction de quatre points : la formulation, le débat, la mise en oeuvre et la reformulation.
1. La formulation
Se pose en premier lieu de comment et où se font les normes ? Il est fondamental d’identifier la produc¬tion des normes et ses acteurs, tout en tenant compte des acteurs cachés, tels les lobbies de l’industrie pharmaceutique. L’activisme des cher¬cheurs est également à relever. Dans tous les cas, il ressort que la norme fait partie d’un processus dynamique qu’il est nécessaire de contextualiser et d’actualiser, notamment au regard des évolutions de la science et de la société.
2. Le débat
Comment et dans quel espace légitime s’établit la contro¬verse scientifique ? La sphère médiatique en est-elle un, sachant qu’elle engendre à la fois la transparence mais aussi la publicité ? Le débat fait s’affronter le travail des chercheurs « constamment fondé sur l’incertitude » à la recherche de vérités souhaitées par la société. Le lieu officiel de discussion est donc important.
3. La mise en oeuvre
Les difficultés liées à la mise en oeuvre des normes établies relèvent de leur prolifération et des interactions qu’elles im¬pliquent. Dans ce débat s’est posée la question de la fragili¬sation de la communauté des chercheurs et de la nécessité de redonner du sens à un certain nombre de métiers dans l’objectif de pouvoir rendre compte des stratégies qui ont été pensées pour les élaborer : historiens, philosophes, juristes….
4. La reformulation
La reformulation des normes revient à renormer. Il s’agit d’une « vision dynamique » qui consiste, compte tenu des évolutions, à reformuler et rediscuter les normes. Pour ce faire, il est essentiel que les différents domaines scientifiques et disci¬plinaires continuent à travailler ensemble.
La séance se termine par des remerciements unanimes, de la part des participants à l’Université d’été et de la part des organisateurs avec Bertrand Collomb et Marie-Françoise Chevallier- Le Guyader .